Discours de Bernard Giusti pour la Commémoration de la Libération de Paris, 25 août 2016
Mesdames, Messieurs,
Chers camarades,
Tous les ans, le 25 août est l’occasion pour chacun de se souvenir de ces hommes et de ces femmes qui, dans les hôpitaux ou ailleurs, ont donné leur vie pour que nous vivions libres. Tous les ans, c’est aussi l’occasion de nous rappeler qu’au sortir de la guerre, dans une France ravagée et appauvrie, des hommes et des femmes regroupés au sein du Conseil National de la Résistance (CNR) ont mis en place des institutions qui devaient permettre un indéniable progrès social.
Le 25 août 1944, à l’initiative du peuple parisien, notre capitale était libérée du joug pétainiste et nazi. Après de longues années de dictature, cette libération, bientôt suivie par celle de notre pays tout entier, suscita un immense espoir de liberté et de justice sociale. Le CNR, né dans la clandestinité et désormais associé à un gouvernement d’union nationale, répondit à cet espoir en créant notamment la Sécurité Sociale et des soins gratuits pour tous, en mettant en place la protection maternelle et infantile, les retraites par répartition, bref, une large protection sociale qui permettait à tous les travailleurs de subvenir à leurs besoins élémentaires. Dans le même temps, ce programme, élaboré avec toutes les forces vives de la Nation, à l’exception du patronat (la très grande majorité des patrons français ayant ouvertement et honteusement collaboré avec les nazis), dans le même temps donc les banques et les ressources naturelles, énergétiques et financières, furent nationalisées afin d’éviter que les intérêts particuliers du patronat ne supplantent les intérêts de la Nation.
La Libération de Paris, ce ne fut pas seulement le refus de la dictature, ce fut aussi l’affirmation de la solidarité entre tous les citoyens, de la justice pour tous et de l’indépendance de la Nation.
L’année qui vient de s’écouler a été marquée par des attaques sans précédent contre les droits des travailleurs. Au mépris de la démocratie et malgré la très large opposition du peuple français, la Loi Travail a été promulguée de façon autoritaire par un gouvernement largement minoritaire. Et quoi qu’en ait dit la propagande patronale diffusée par les médias, la mobilisation des travailleurs a été massive et déterminée. Derrière une CGT renforcée par l’élection au Secrétariat national de Philippe Martinez, et avec l’appui des autres forces progressistes de notre pays, des millions de citoyens ont manifesté leur colère dans les rues. Car cette Loi Travail est une régression inégalée dans notre République, puisqu’elle ramène les droits des travailleurs cent ans en arrière en les livrant pieds et poings liés entre les mains des patrons. Mais ce gouvernement minoritaire a refusé d’écouter les citoyens et a choisi sans vergogne de se mettre au service des patrons et de la finance, c’est-à-dire au service de ceux-là mêmes que les libérateurs de Paris, toutes tendances politiques confondues, avaient jadis écartés en raison de leur nocivité pour la Nation.
De la même façon, le Plan Hirsch a été élaboré et appliqué malgré l’opposition de la grande majorité des agents de l’APHP et de leurs organisations syndicales. Le Plan Hirsch, dans la droite ligne de la Loi Bachelot, est une adaptation de la Loi Travail à nos hôpitaux. Le but est de rendre les agents taillables et corvéables à merci au service de l’administration hospitalière. Le Plan Hirsch couplé à la Loi Travail permettra de gérer des sous-effectifs chaque année plus dramatiques. Et chaque année ces sous-effectifs mettent de plus en plus en danger les patients et les agents. Les surcharges de travail qui en découlent conduisent un nombre croissant de nos collègues à des dépressions dues à la souffrance au travail. Tout ceci se fait au nom d’une logique comptable qui a depuis longtemps supplanté les logiques médicales. Une logique comptable qui voudrait que les hôpitaux soient rentables au nom d’une prétendue gestion saine de nos hôpitaux, alors que dans le même temps nos gouvernements dilapident des milliards de nos impôts pour payer les patrons et les actionnaires. On le voit, on est bien loin de l’esprit qui présida à la Libération de Paris en 1944.
En cette année 2016, nous célébrons aussi le 80e anniversaire du Front Populaire qui en 1936 arracha au patronat des avancées sociales inégalées en permettant aux travailleurs de bénéficier un peu des fruits de leur travail, et dont la mesure emblématique reste encore aujourd’hui l’obtention des congés payés.
1936, 1944 : deux dates qui symbolisent la justice, l’espoir et la liberté.
Mais en cette année 2016, pour la très grande majorité de nos concitoyens la justice sociale a volé en éclats et la démocratie est piétinée. Les idéaux détestables du fascisme et du nazisme, tels que par exemple la stigmatisation de certaines communautés de citoyens ou encore des syndicalistes, assimilés ouvertement par des responsables politiques à des terroristes, ont désormais la part belle dans les médias. Aujourd’hui, à l’heure où le patronat et les financiers gouvernent notre pays, où des lois indignes destinées à asservir les citoyens sont promulguées au mépris de la démocratie, la CGT Cochin ne peut que constater que le pays est plus que jamais divisé, division qui est précisément l’effet de cette politique patronale qui profite à quelques-uns et appauvrit la très grande majorité des citoyens. Le légitime sentiment d’injustice, général dans tout le pays, est particulièrement flagrant dans notre hôpital qui, à travers les nombreuses restructurations, subit de plein fouet cette offensive libérale contre les travailleurs.
En ce jour de commémoration de la Libération de Paris – Libération à laquelle la CGT participa massivement en prenant les armes – le plus grand hommage que la CGT Cochin puisse rendre en 2016 aux libérateurs de Paris, c’est bien de rester fidèle aux valeurs qu’ils ont défendues, c’est bien de continuer, comme elle l’a toujours fait, de défendre la justice sociale, l’équité et la solidarité.
Bernard Giusti
Secrétaire Général Adjoint de la CGT Cochin
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